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Franck Courtès, grandeur et misère du métier d'écrivain - Le Monde

L’écrivain Franck Courtès, le 7 juillet, à Paris.

Le jardin qu’abritent les éditions Gallimard est à la française ; les allées sont impeccablement ratissées ; la fontaine offre un charmant bruit de fond. Un matin d’été, on retrouve Franck Courtès dans ce lieu de luxe et de calme. La veille, il a appris que son recueil de nouvelles Les Liens sacrés du mariage (Gallimard, 2022) était récompensé par l’Académie française. Gallimard, l’Académie : voilà qui vous pose un auteur en matière de capital symbolique. Mais ce capital a ceci de particulier qu’il ne nourrit pas son homme.

La gigantesque distorsion entre le prestige de la littérature et la difficile vie matérielle des auteurs est au cœur du nouveau livre de l’écrivain. Des chiffres ? La plupart des auteurs touchent entre 8 % et 10 % du prix de vente hors taxe du livre – moins de 1,50 euro par exemplaire. Et ils sont 67 % à exercer une autre profession pour pouvoir vivre, selon la Société civile des auteurs multimédia (SCAM) et la Société des gens de lettres (SGDL).

A pied d’œuvre raconte la « panade » massive dans laquelle le choix d’embrasser, de manière absolutiste, le métier d’écrire a mené Franck Courtès. Comment cet homme, né en 1964, s’est retrouvé, à la cinquantaine, à s’inscrire sur une plate-forme, dont il tait le nom, qui met en relation des particuliers et des personnes proposant leurs bras pour de menus (ou pas) travaux, à prix cassé. Moyennant 20 euros l’après-midi, 30 les bons jours, il a débarrassé des gravats au dernier étage d’immeubles sans ascenseur, taillé les buis d’une terrasse, nettoyé des kilomètres carrés de vitrines, monté et démonté des meubles à la chaîne. Il s’est abîmé « les épaules, le dos, les pieds, les genoux », énumère-t-il de sa voix douce. Au point, d’ailleurs, de devoir arrêter les frais. « Pour le moment, en tout cas. »

La photo, une « raison d’être »

Vous ne l’entendrez pas se plaindre, ce n’est pas le genre de cet homme bien élevé, dont on ne remarquerait pas que ses vêtements bien coupés – pantalon noir, chemise blanche – sont légèrement élimés si on n’y prêtait attention. La lamentation n’est pas non plus le ton de son livre, qui relate cette histoire avec une élégante distance, une sobriété dopée à l’auto-ironie, prompte à moquer sans égards excessifs ce bourgeois que rien n’avait préparé à pareil déclassement.

Ni sa jeunesse dans le 5e arrondissement de Paris, mère au foyer, père directeur d’une caisse d’allocations familiales, tennis le samedi, religieuses au chocolat pour le goûter, pluie de cadeaux pour Noël et les anniversaires… Ni la carrière qu’il a choisie ensuite, où il a connu le succès : la photographie. Pendant vingt-cinq ans, Franck Courtès a été un nom qui comptait dans le milieu.

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