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Ce qu'il faut savoir sur l'histoire du Japon pour comprendre Shogun - National Geographic France

Pour comprendre les tensions que pouvait faire surgir la présence d’un Britannique, protestant de surcroît, dans le Japon féodal des années 1600, il faut tracer les contours du commerce Nanban. Nanban-bōeki-jidai (南蛮貿易時代), littéralement l’« époque du commerce avec les Barbares du Sud », a duré de 1543, année de l’arrivée des premiers Européens au Japon, jusqu’à leur exclusion de l’archipel en 1650 avec la promulgation de lois interdisant aux étrangers l’entrée sur le territoire. 

Jusqu'au milieu du 16e siècle, l’archipel du Japon était inconnu des Européens. Dans sa Chronique des armes à feu (1606), l’une des sources historiques les plus célèbres du Japon, le moine zen Bunshi Genshô décrit ainsi les marchands portugais et missionnaires jésuites qui débarquèrent au sud de l’archipel : « apparut un grand vaisseau [à Tanegashima]. Nul ne savait d'où il venait. Il portait plus d'une centaine de personnes à bord, toutes avec une physionomie différente de la nôtre, qui parlaient des langues aux sons incompréhensibles. Tous ceux qui les virent furent stupéfaits. Parmi eux, se trouvait un lettré confucéen venu de Corée [qui écrivit avec son bâton sur le sable] "ces hommes sont des marchands de la race des barbares du pays du nanban. Ils ont une conception rudimentaire des relations fondamentales entre les maîtres et leurs sujets, mais ignorent le cérémonial des bonnes manières. Ils boivent de l'eau dans un gobelet, mais ne font jamais la politesse de l'offrir. Ils mangent avec les mains, sans se servir de baguettes. Ils ne connaissent pas les caractères et encore moins les enseignements qu'ils transmettent. Il s'agit de gens qui, dès qu'ils arrivent en un lieu, se mettent à commercer en échangeant ce qu'ils possèdent contre ce qu'ils n'ont pas." » 

Outre le désir d’expansion coloniale, l'occident était persuadé de sa mission civilisatrice auprès des autres peuples et va tenter, dans le dynamisme de la Contre-réforme catholique européenne, de convertir les peuples rencontrés ou conquis au christianisme. À l’instar de l’Espagne, le Portugal était alors une grande puissance coloniale et cette ère d’échanges commerciaux et culturels avec le Japon porte aussi le nom de « siècle des chrétiens ». Sylvie Morishita raconte dans ses travaux comment saint François Xavier, l'un des fondateurs de la compagnie de Jésus, posa le pied sur le sol de l'archipel nippon. Avec deux autres compagnons jésuites, ils s'installèrent dans un pays dont ils ne connaissaient ni la langue ni les usages et en proie à la guerre civile. Pour les jésuites, l’enjeu était d’intégrer les élites sociales japonaises pour évangéliser les populations. Si l’accueil fut très timide en Inde et en Corée, la mission jésuite connut un relatif succès au Japon, ce qui nourrit beaucoup d’espoirs en Occident. La chrétienté se diffusa dans l’archipel et au début du 17e siècle, on estimait à 300 000 le nombre de chrétiens vivant au Japon.

« Les jésuites vont profiter du morcellement du pouvoir en visant les élites locales, et notamment les daimyos, les seigneurs locaux. Une fois converti, le seigneur décrétait que son fief était chrétien, ce qui ne signifie pas pour autant que toutes les âmes du fief étaient devenues chrétiennes » modère Julien Peltier, spécialiste du Japon féodal et auteur de nombreux livres, dont le dernier en date, Une autre histoire des samouraïs, vient de paraître.

L’évangélisation du Japon ne se fit pas sans heurts. Toyotomi Hideyoshi, deuxième des trois unificateurs du Japon durant la période Sengoku, « l’âge des provinces en guerre », se méfiait des missionnaires et des convertis au christianisme. « Juste avant sa mort, Hideyoshi durcit le ton car il s'inquiétait de voir se former une coalition de seigneurs chrétiens qui pouvaient menacer son pouvoir » relève Julien Peltier. Il condamna à l’exil Takayama Ukon, un samouraï converti au catholicisme, puis sur ses ordres, vingt-six chrétiens, des Japonais et des missionnaires étrangers, franciscains et jésuites, moururent par crucifixion le 5 février 1597 : c’est le Grand martyre de Nagasaki. 

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