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Barbie : Ken est le problème du film (et Ryan Gosling n'y peut rien) - EcranLarge

Et si Ken était le gros problème du film Barbie ? Et que même le génial Ryan Gosling n'y pouvait rien ?

Notre critique du film Barbie

Son “visage” est partout depuis plusieurs mois, et son nom est sur toutes les lèvres : Barbie, célèbre poupée faite femme sous les traits de Margot Robbie le temps d’un film, est en train de conquérir une nouvelle fois la planète à travers la caméra de Greta Gerwig. Mais elle n’est pas seule dans cette entreprise.

A ses côtés, Ken, le blondinet musclé aux chemises pastel, est un personnage mi-sidekick mi-antagoniste qui assure la caution comique du film. Et avec Ryan Gosling dans le rôle, l’effet est évidemment réussi. Peut-être même trop réussi ?

ATTENTION SPOILERS SUR LE FILM BARBIE

 

Yes we ken

Le choix de Ryan Gosling dans le rôle de Ken était à la fois évident et génial. Après avoir explosé auprès du public dans le rôle taciturne et violent du héros de Drive en 2011, Gosling arbore ici la même coupe et les mêmes muscles, version platine et bronzage, pour incarner le parfait négatif de son rôle mythique du “driver”. Tout comme ce dernier, le pendant masculin de Barbie n’a ni passé ni histoire, et ne vibre que pour sa blonde. Sauf que, lui, il s’habille en couleurs de layette et se déplace en rollers fluos plutôt qu’en voiture.

D’entrée de jeu, Gosling apporte à son Ken le bagage de sa filmographie pleine de rôles dramatiques et sombres, et son image d’acteur à la fois intense et intelligent, qui aident au second degré du personnage et du film. Mieux : ce rôle d’homme-poupée est l’occasion rêvée de parodier son image de gendre idéal entretenue par la mode des memes internet le mettant en scène comme l’homme parfait.

Et ce n’est pas tout : avec quelques comédies à son actif, comme les géniaux Crazy Stupid Love et The Nice Guys, Gosling a déjà largement prouvé qu’il avait un énorme potentiel comique, ainsi qu’un impeccable sens du timing et de la grimace.

Barbie : Bande-annonce finaleDrive 2023

 

Evidemment, il s’en donne à cœur joie dans le film de Gerwig et fait montre de tout son talent d’acteur, de comique et même de danseur. Mais son apport au film ne s’arrête pas là ! Pendant la promotion du film, Gosling a continué de faire vivre son personnage en chantant les louanges du scénario (“C’est le meilleur scénario que j’aie jamais lu”), de la réalisatrice et de la partenaire de jeu d’un film qui n’avait rien pour attirer le public qui avait pu le vénérer dans Drive ou Blade Runner 2049.

Gosling a élégamment mis en scène son “retrait” du devant de la scène pour laisser la lumière à Robbie (“Ce ne serait pas fidèle à mon personnage de Ken que de parler de lui”), tandis que celle-ci a raconté à l’envi à quel point Gosling avait été une personne drôle et attentionnée tout au long du tournage lors de diverses interviews.

Bref : comprenez que Ryan Gosling est la huitième merveille du monde, et sa présence au casting de Barbie est une bénédiction divine.

Barbie : photo, Ryan Gosling

Ryan se gausse-ling

Finies les kenneries

Le problème... c’est Ken. Parce que si Gosling est un plaisir de tous les instants dès qu’il apparaît à l’image, ce n’est pas pour autant que l’utilisation de son personnage est pertinente. Loin de là. Au fur et à mesure que l’intrigue du film se déroule, Ken apparaît de plus en plus comme un parasite sur une trame narrative déjà peu solide.

Pour commencer, et en comparaison de ce qui était sous-entendu dans la promotion du film, il est surprenant que ceux qui devaient être l’antagoniste évident du film – les patrons capitalistes et machistes de Mattel – soient relégués à un plan très secondaire. Ils sont  à peu près inutiles au profit de Ken qui devient le méchant de l’histoire (ou, a minima, l’ennemi de Barbie).

A partir de là, le propos du film change, et ce qui était parti pour n’être qu’une intrigue secondaire déplace l’enjeu de “quelle place ont les femmes dans le vrai monde ?” à “quelle place ont les Ken à Barbieland ?”.

Barbie : sortira pas au Vietnam

La France du tissu Vichy

Et même si l’idée est amusante (caricaturer les caprices des masculinistes en dépeignant un Ken qui veut du jour au lendemain s’approprier tous les codes caricaturaux du patriarcat), la plaisanterie finit par prendre toute la place et noyer l’histoire de Barbie. Une stratégie surprenante pour un film qui hurle son prétendu féminisme dans ses dialogues, et qui semble donc avoir du mal à réellement le mettre en pratique dans sa narration, pour préférer l’humour facile et enfantin d’un Ken qui joue au Texan beauf.

Le dernier acte consiste d’ailleurs essentiellement en une longue plainte de Ken qui souffre de ne pas dominer autant Barbie que les hommes dominent les femmes dans les règles du patriarcat, et Barbie qui se doit de le consoler et de rassurer son ego fragile pour qu’il arrête d’être menaçant. Ce serait déjà lourd si l’humour était réellement tenu, mais la séquence en question penche franchement du côté du 1er degré, et éclipse les (courts) moments pendant lesquels on voit les Barbie reprendre le pouvoir et résoudre l’élément perturbateur initial.

 

Barbie : photo, Ryan Gosling

Chic-Ken

cogito ergo seum

Mais pourquoi est-ce si gênant que la ligne directrice du film soit à ce point modifiée par la place que prend Ken dans l’histoire ? D’autant plus que Ryan Gosling campe son rôle à la perfection.

Ce “parasitage” a plusieurs conséquences sur l'efficacité du film. Au-delà de ce qu’il révèle sur son simple féminisme de façade (également trahi par de nombreux autres éléments qui ne sont pas le sujet de cet article), il compromet certains de ses aspects les plus réussis.

Par exemple, on y perd bien sûr la dynamique initiale entre Barbie et Ken. C'était sans doute l’aspect le plus drôle, et d’ailleurs largement mis en avant dans les bandes-annonces et la promotion en général : la scène où Ken révèle ne pas savoir ce que peut faire un couple ensemble le soir, celle où il surprend Barbie dans la voiture en chantant avec elle, la manière dont il semble la vénérer sur chaque affiche comme si elle était une divinité vivante (un véritable propos du film vis-à-vis de la place de Barbie dans l’éducation des petites filles)…

Barbie : photo, Ryan Gosling

Libérez le kra-Ken

 

Autant de choses amusantes et pertinentes mises en place et vendues comme étant essentielles au film, pour mieux être balayées et remplacées par un bon vieux “ma gonzesse conduit elle-même sa voiture, j'en suis insulté au plus profond de mes couilles”. Le piquant des dialogues disparaît pour tourner en boucle sur la complainte du surfeur sans vague.

Par la même occasion, les personnages de Gloria et Sasha, dont le lien avec Barbie est censé être le cœur émotionnel du film et le nœud dramatique principal, passent à la trappe et sont finalement peu présentes dans le film. Tout du moins, leur relation avec Barbie est moins prégnante, moins mise en avant et moins amusante que celle de Ken.

Dès lors, l’impact de l’histoire est réduit parce que ses tenants et aboutissants sont dilués dans la sous-intrigue des Ken, forcément plus intéressante non pas dans son propos mais dans sa forme, parce que tout l’humour et le spectacle sont réservés aux poupées masculines. D’ailleurs, le fait que Ken ait littéralement une chanson et un numéro de danse pour lui seul (une scène très importante pour Greta Gerwig, comme elle le dit en interview), alors que l’héroïne-même du film n’en a pas, en dit long sur le peu de folie autorisée à Barbie dans sa propre histoire.

 

Barbie : Barbie les premiers avis sont là

Karaoken

Pour toutes ces raisons, alors que la présence d’un Ryan Gosling au casting ne peut être qu’un atout en soi et que sa performance est aussi géniale qu’espérée, le personnage de Ken s’avère être à bien des égards un boulet vis-à-vis de ce que le film prétend être. Reste le sentiment que Mattel, qui a accepté de se parodier à travers les personnages de bureaucrates dont Will Ferrell, a tout de même préféré se protéger en détournant l’attention et en faisant de Ken un antagoniste à l’ambition beaucoup plus facile (pour eux) à dénoncer que leur propre industrie du plastique sexiste.

A tel point que le film semble souffrir de son envie d’être directement un spin-off sur Ken sans passer par une véritable histoire autour de Barbie (ce qui est tout de même un comble), chose qui est d’ailleurs brièvement évoquée dans le rêve patriarcal du personnage. Il fallait donc comprendre que les fameux "elle est tout" et "il est juste Ken" de la promo n'étaient en fait pas la célébration d'une héroïne féminine, mais l'annonce du problème que celle-ci pose à son incel de boyfriend. Cruelle redescente pour la soi-disant icône féministe des petites filles.

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