Nous voici dans un futur proche qui promet un monde meilleur. Les humains peuvent, s’ils le souhaitent – car ils sont encore décisionnaires –, se débarrasser de leurs idées noires en purifiant leur ADN. Il leur suffit de se confier au « bras » expert de la machine à faire des piqûres, qui semble sortie d’un rêve de David Cronenberg. Une jeune femme (Léa Seydoux) hésite encore, revisite son passé, du temps où elle portait une perruque à bouclettes, puis tressaille. L’image d’une de ses précédentes morts revient la hanter. Le spectateur la suit dans le dédale de ses vies antérieures, dont elle se souvient très bien…
Il ne fait guère de doute que La Bête, de Bertrand Bonello, qui concourt pour le Lion d’or à la Mostra de Venise, dont la 80e édition s’achèvera le 9 septembre, figure parmi les œuvres les plus excitantes de la compétition. Le nouveau film du réalisateur de L’Apollonide. Souvenirs de la maison close (2011) et de Zombi Child (2019) est librement adapté de la nouvelle de Henry James, La Bête dans la jungle (1903), avec Léa Seydoux et George MacKay – l’acteur britannique a remplacé Gaspard Ulliel, mort le 19 janvier 2022 à l’âge de 37 ans, et La Bête est dédié au comédien français.
Avant de se plonger dans cette œuvre futuriste, précisons qu’un autre film inspiré du même ouvrage, le somptueux La Bête dans la jungle, de Patric Chiha, avec Anaïs Demoustier et Tom Mercier, est sorti en France le 16 août, après avoir été sélectionné à la Berlinale (Panorama). Nous y reviendrons, tant ces deux œuvres dialoguent entre elles.
Univers à plusieurs facettes
Dans la nouvelle de Henry James, un jeune homme prénommé John pressent qu’un événement tragique pourrait le terrasser. Il partage son secret avec une proche, May, et le tandem, qui semble amoureux même si rien ne se passe, laisse le temps filer. Tandis que Patric Chiha transpose l’histoire dans une boîte de nuit, de 1979 à 2004, Bertrand Bonello déploie un univers à plusieurs facettes pour ses deux personnages, Gabrielle et Louis. Ce dernier, homme désirant qui attend son heure, s’avérera tantôt un amoureux patient, tantôt un dangereux frustré sexuel.
L’une des idées les plus troublantes du récit est cet objet « poupée » qui traverse les époques, déployant toutes sortes d’imageries – la féminité docile, la beauté normée, mais aussi la manipulation et la destruction, comme un écho aux poupées désarticulées de l’artiste Hans Bellmer (1902-1975). Nous voici dans une usine à l’ancienne où le poupon a des yeux de porcelaine empruntés à ceux de Léa Seydoux (un plan des plus marquants, où le regard de l’actrice bascule dans une autre dimension). Plus tard, la poupée prend la forme d’un androïde, qu’incarne avec une belle volupté Guslagie Malanda, révélée dans Saint Omer (2022), d’Alice Diop. Comme si l’intelligence artificielle, à force d’imiter les humains, en venait à partager leurs désirs. Voire, un jour, à prendre leur place ?
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