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REPORTAGE. Festival d'Avignon 2024 : "Ils veulent nous privatiser", les syndicats et les intermittents du spectacle vivant craignent pour leur avenir - franceinfo

Le grand rendez-vous du théâtre se déroule cette année en partie au même moment que les élections législatives. Samedi, veille du premier tour, les principaux syndicats du spectacle vivant se sont réunis à Avignon pour exprimer leurs craintes.

France Télévisions - Rédaction Culture

Publié

Temps de lecture : 3 min
La facade du Palais des papes à Avignon, samedi 29 juin 2024 au moment de l'ouverture du Festival, après une manifestation. (FRANCEINFO Yemcel Sadou)

L’ouverture de ce 78ème Festival d’Avignon samedi 29 juin est plus morose que les autres. La veille du premier tour des élections législatives, les intermittents du spectacle sont accablés et inquiets à la possibilité de voir l’extrême droite arriver majoritaire à l'Assemblée nationale. Après un rassemblement au Palais des Papes en début d’après-midi, les principaux syndicats du spectacle vivant se sont réunis au Cloître Saint-Louis avec le directeur du Festival, Tiago Rodriguez.

Cette "agora" ouverte à tous, arrive en pleine période de "réserve électorale". Impossible pour ces acteurs du spectacle vivant d’appeler à voter pour un parti politique. La prudence et les périphrases sont donc de mise dans leurs discours, mais pas pour le public.

Tiago Rodriguez insiste sur la "portée citoyenne" de cette édition "atypique". "Ces élections sont cruciales pour la démocratie en France, mais pas seulement, aussi en Europe et dans le monde", dit-il avec gravité. Ghislain Gauthier, secrétaire général de la CGT Spectacles rappelle que les services publics dont fait partie le spectacle vivant, sont mis à mal avec une "politique de casse, de réductions de moyens et un sentiment d’abandon". Tous ces syndicats pointent de plus en plus de difficultés à monter des spectacles en raison des baisses de subventions, qui ne datent pas de la dissolution de l'Assemblée nationale par Emmanuel Macron, le dimanche 9 juin au soir des élections européennes.

"Une compagnie a pris des positions très claires sur la situation à Sainte-Soline. Elle a été pointée comme ne respectant pas les valeurs républicaines et a été privée de subventions", témoigne Emmanuelle Gourvitch, présidente du Syndicat national des arts vivants (SYNAVI). "Si demain ce genre d’agissements étaient encouragés et légitimés par des hauts fonctionnaires, ce serait catastrophique pour la liberté de création et d’expression", ajoute-t-elle. "Je ne crois pas que ces gens veulent nous faire disparaître, ils veulent nous privatiser".

Les intermittents pointent la nécessité de se réunir pour trouver des solutions concrètes afin de procéder à une "refonte des modèles à bout de souffle". "Nous savons à quel point l’assurance chômage est importante pour nos vies. Elle peut être attaquée à tout moment, rien ne les empêche, majorité absolue ou pas", fustige un intermittent avec fermeté. "Les théâtres devront devenir des poches de résistance".

"L’éducation populaire essaye de combler des gouffres qu’elle n’a pas les moyens de combler", pointe Franck, un intermittent qui travaille dans les quartiers populaires face à des publics qu’il décrit comme "résignés". Côme, une autre intermittente, interpelle directement Tiago Rodriguez sur la position du festival en cas de victoire de l’extrême droite. Devoir de réserve oblige, le directeur trouve difficilement ses mots. "Ce sera un festival de résistance qui ne collabore pas", finit-il par répondre.

Cathy, chargée de production, s’interroge sur ceux qui n’iront pas voter. "On est tous convaincus ici, on est dans un très bel endroit à côté d’un hôtel 4 étoiles, mais si le festival rentre vraiment en résistance, comment va-t-on faire pour convaincre ceux qui ne nous voient pas ?". "Le public du Festival d’Avignon est très divers et issu de différentes expériences de vie. On essayera de mobiliser le plus possible", répond Tiago Rodriguez.

C’est surtout l’intervention de Jade, une étudiante avignonnaise engagée, qui a fait sensation. "On est un peu déçus que la jeunesse ne se mobilise pas assez. Je vous invite à aller tracter dans les quartiers populaires où la culture n’est pas assez accessible", dit-elle. "Les jeunes sont très réceptifs et n’attendent qu’une chose, c’est qu’on aille les voir. Beaucoup trop de personnes ont des stéréotypes en se disant 'les quartiers ça craint, on va se faire caillasser'. Ce n’est pas vrai, si vous avez un peu de temps, allez à leur rencontre, ce seront les premiers touchés", a-t-elle déclaré sous les applaudissements.

Un grand rassemblement interprofessionnel est prévu mercredi 3 juillet Place de l'Horloge, et d’autres devraient s’organiser après les résultats du premier tour.

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